Séminaire « Recherche, arts et pratiques numériques » (2018-2019)

Comité d'organisation : Jean Cristofol (Ecole Supérieure d’Art d’Aix-en-Provence), Jean-Paul Fourmentraux (Centre Norbert Elias, CNRS/AMU/EHESS), Anna Guilló (LESA, AMU/CNRS), Cédric Parizot (IREMAM, CNRS/AMU) et Manoël Pénicaud (IDEMEC, CNRS/AMU).

Séances le mercredi de 10h à 13h à l'IMéRA, Maison des astronomes, 13004 Marseille.
Première séance : mercredi 31 janvier 2018, 10h-13h, IMéRA, Marseille.

Thématique du séminaire

Ce séminaire transdisciplinaire s’intéresse aux perturbations productives que génèrent les collaborations entre les chercheurs en sciences humaines et les artistes dans le domaine du numérique. Il s’inscrit dans la suite des réflexions et des expérimentations que nous avons menées à l’IMéRA dans le programme antiAtlas des frontières depuis 2011 tout en élargissant notre questionnement au-delà de la seule question des frontières.

Dans le domaine des sciences humaines et sociales, le recours aux pratiques numériques conduit à de nombreux bouleversements que ce soit dans la collecte, la production et le traitement de données, ainsi que l’élaboration de nouvelles formes de narration et d’édition. Le tournant numérique conduit les chercheurs à reconsidérer leurs méthodes, leurs catégories, leurs paradigmes, leurs orientations théoriques, leurs objets, leurs formes de labellisation et les cadres des champs disciplinaires. D’ailleurs, compte tenu des collaborations toujours plus nombreuses qu’implique le recours au numérique entre d’un côté les sciences humaines et de l’autre les sciences exactes et expérimentales, il semble plus pertinent de parler de Digital Studies que Digital Humanities.

Dans le domaine de l’art, le numérique ouvre également des champs de pratiques radicalement nouveaux. Il transforme la relation des artistes aux outils qu’ils utilisent et aux connaissances qu’ils convoquent, produisent ou questionnent. Il transforme le statut et les formes des œuvres. En introduisant de nouvelles modalités pour assurer leur circulation, il modifie également leur relation avec le public. Le numérique bouleverse la place de l’auteur qu’il place dans une relation dynamique par rapport aux flux d’information, de circulation des images, des sons et des formes. Il donne ainsi une nouvelle importance à l’invention de dispositifs dans lesquels ces formes sont données à l’expérience, ouvrant d’infinies possibilités d’interaction avec l’œuvre. Il donne enfin une nouvelle dimension au travail collectif, à des formes diverses de collaborations, d’échanges et de contributions. D’une façon générale, on peut dire que le numérique déplace les pratiques artistiques et conduit à réfléchir autrement les relations entre arts et sciences.

Ce séminaire rassemblera des chercheurs en sciences humaines (sociologues, anthropologues, politologues, géographes, historiens, littéraires), en sciences dures (informaticiens, physiciens, mathématiciens, etc.), des artistes (designers, hackers, programmeurs, média tactique, etc.) ainsi que des professionnels (industriels, chargés de communication, etc.). Notre objectif est de favoriser des croisements, des emprunts et des déplacements qui seront propices à l’identification de nouvelles pistes de réflexion et de recherche, voire à la mise en œuvre d’expérimentations collaboratives.

Chaque mois, des participants seront invités à présenter leurs expérimentations d’outils numériques de collecte (applications mobiles, capteurs oculaires, systèmes SIG, etc.) ou d’indexation et de traitement des données recueillies (bases de données, systèmes de visualisation ou de sonification, etc.). Certains feront part de leurs explorations de dispositifs d’écriture et de modélisation de la connaissance (jeux vidéo, machinima, web documentaires, etc) ou encore de nouvelles formes d’édition électroniques.

Trois types de questions seront développés :
1) Il s’agira tout d’abord de voir comment, et jusqu’à quel point, ces pratiques et instruments transforment notre rapport au monde, nos méthodes de recherche, la construction de nos objets, la modélisation et la diffusion de notre connaissance et de nos oeuvres.
2) Nous nous interrogerons aussi sur l’impact des processus collaboratifs qu’impliquent les pratiques numériques entre chercheurs, artistes et professionnels. L’objectif est d’évaluer les apports que chaque démarche (scientifique, artistique, professionnelle) apporte aux autres.
3) Nous verrons enfin comment ces processus collaboratifs bouleversent les champs disciplinaires, les points de vue et les formes d’autorité qui organisent notre recherche et notre pratique et conduisent à repenser de manière créative de nouvelles formes de rencontre entre les disciplines scientifiques et entre celles-ci et les non-spécialistes.

Partenariat

IMéRA, Institut Méditerranéen de Recherches Avancées (AMU), IREMAM, Institut de Recherches et d’Etudes sur le monde arabe et musulman (CNRS/AMU), Ecole Supérieure d’Art d’Aix-en-Provence, IDEMEC, Institut d’Ethnologie Méditerranéenne Européenne et Comparative (CNRS/AMU)

Calendrier 2018-2019

Recherche, arts et pratiques numériques #15

31/01/2018, 10h-13h, IMéRA, Marseille.

"Post cinéma et anthropologie."

Avec : Pascal Cesaro, chercheur et documentariste, PRISM, Aix-Marseille Université, CNRS. Pierre Fournier, Sociologue, Laboratoire méditerranéen de sociologie, LAMES,Aix-Marseille Université, CNRS.

Sur les traces des atomistes. Un pas de côté pour un sociologue de terrain.

A partir d’extraits du film documentaire Sur les traces des atomistes (Pascal Cesaro et Pierre Fournier, 90mn, 2016) nous reviendrons sur notre usage d’images d’archives comme outil de recherche en sciences sociales. Nous présenterons comment à partir d’une archive audiovisuelle issue d’une série de fiction de la fin des années 1960 mettant en scène la vie de travailleurs d’un centre nucléaire en Provence on espère mieux comprendre ce que veut dire venir travailler dans cette industrie. Montrer des extraits de ce feuilleton à des gens vivant aujourd’hui près du même centre, permet-il de dépasser les représentations abstraites du débat public sur ce sujet polémique ou le silence derrière lequel se retranchent parfois les personnes vivant près des centres nucléaires ?

Krista Lynes, communication studies, Concordia University, Canada, résidente de l’IméRA, Marseille.

Notes sur l’Index : penser le "réel" à l’ère numérique.

La question de l’indexicalité des images-médias est devenu centrale dans les méthodes de recherche en sciences humaines autant que pour les formes d’art politique ou engagé, portant particulièrement sur leur capacité de rendre compte fidèlement de la vie sociale. De ce fait, le problème de l’indexicalité des images s’avère doublement épistémologique et éthique. Renvoyant à un pari risqué, toujours instable, le concept d’indexicalité est aujourd’hui malmené par les changements technologiques, culturels, économiques et politiques : passage des médias ‘analogues’ aux médias ‘numériques’ (avec la mutabilité inhérente de ces derniers) ; passage de la surface du monde visuel vers le ‘big data’ (et donc vers les paradigmes algorithmiques du réel, non plus liés au champ visuel, mais à la statistique). Il y a néanmoins toujours plus d’images en circulation, davantage de visualisations algorithmiques (‘beautiful data’), qui accompagnent la transformation du champ visuel en base de données. Ma présentation cherchera à explorer cette charge de l’indexicalité dans la recherche interdisciplinaire et artistique, elle sera centrée plus précisément sur les projets médiatiques entourant la ‘crise migratoire’ (Forensic Architecture, the Visual Social Media Lab, UNITED, ainsi que d’autres tactiques visuelles).

Jeff Daniel Silva, artiste-chercheur, Sensory Ethnographic Lab, Harvard University, Centre Norbert Elias (CNE) AMU/EHESS/CNRS.

Linefork (2016) : Recherche visuelle et cinéma anthropologique.

Membre correspondant du Centre Norbert Elias depuis décembre 2016, futur résident à l’IMéRA (2018-2019), Jeff Silva est un réalisateur américain, professeur et programmeur originaire de Boston. Associé depuis son origine au Laboratoire d’Ethnographie Sensoriel (SEL) à Harvard University, il a contribué aux côtés du fondateur et directeur Lucien Taylor au développement d’un programme d’études et de méthodologie appuyé sur la réalisation filmique. Ses travaux, réalisations et recherches anthropologiques, s’attachent à documenter plutôt qu’a expliquer et utilisent pour cela l’ambiguïté et la connaissance implicite. A l’articulation du cinéma documentaire et expérimental, sa communication mobilisera des extraits commentés du film Linefork (2016) et questionnera la part d’intimité dans la relation qu’entretien le documentariste avec son sujet. Ses films les plus récents "Linefork" (2016), "Ivan & Ivana » (2011) et « Balkan Rapsodies: 78 Measures of War" (2008).

Recherche, arts et pratiques numériques #16

21/03/2018, 10h-13h, IMéRA, Marseille.

"Cartographies de l’invisible."

Nicolas Thely, professeur en arts, esthétiques et humanités numériques, Université Rennes 2, Directeur de la MSH Bretagne.

Tantôt caricaturés dans les publicités et les séries télévisées, tantôt montrés du doigt pour leur opportunisme totalement voué à la cause du marché, les critiques d’art contemporain n’ont pas bonne presse. Dans l’entreprise de construction de l’image de la critique d’art, la littérature, la philosophie et les sciences sociales jouent un rôle important mais le critique d’art demeure une espèce difficilement observable ou plus précisément une espèce dont l’activité est difficilement cernable, mesurable et compréhensible. Je proposerai de revenir sur une expérimentation que j’ai mené il y a trois ans et qui a consisté à proposer à deux critiques d’art, d’enregistrer leurs déplacements lors des journées professionnelles de la 56e biennale de Venise qui se sont déroulées du 6 au 9 mai 2015. Que peuvent nous apprennent les données récoltées sur la pratique de la critique d’art ?

Emmanuel Grimaud, anthropologue, directeur de Recherche CNRS au LESC, Université Paris 10, Nanterre.

Chasse au fantômes et cartographie de l’invisible.

Les chasseurs de fantômes (ghost hunters) recourent aujourd’hui à une multitude d’appareils et de technologies sophistiquées pour mesurer les champs électromagnétiques et s’aventurent dans des expéditions nocturnes en quête de présences à détecter avec lesquelles ils tentent d’établir une communication. A partir de chasses suivies en temps réel, on tentera de répondre à toute une série de questions, notamment celle de savoir comment cartographier un espace invisible ou encore pourquoi un tel déballage de technicité dans un domaine en apparence dominé par les croyances.

Recherche, arts et pratiques numériques #17

11/04/2018, 10h-13h, Marseille.

"Expérimenter l’espace scénique."

Yannick Butel, professeur des universités, esthétique et réception, LESA (Laboratoire d’Études en Sciences des Arts, Aix-Marseille Université) : De l’octet scénique au hocquet du public. 

Quels rapports entre l’ordre Mevlevi, le prix Brodin reçu par Sophia Kovalevskaya, la création Landschaft mit entfernten Verwandten d’Heiner Goebbels ou le K de Sophie K de Jean-François Peyret ? Ou, et formulons-le d’une autre manière, quelles connexions peut-on faire entre l’ordre des derviches tourneurs qui danse la Sama, une mathématicienne qui s’inquiète de résoudre les équations qui régissent le mouvement d’un solide de forme quelconque soumis à la seule pesanteur, et deux artistes qui recourent aux technologies, à l’image numérique, au TAO (théâtre assisté par ordinateur)… ? En quoi ce triptyque pourrait encore aider la réflexion d’un penseur de l’esthétique et des arts de la scène ?

Sandra Iché, artiste, chorégraphe, Candice Raymond, historienne, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, ERC Civil Wars, Marjorie Glas, sociologue, CMW, Lyon et IRIS, EHESS, Paris : Droite-Gauche : retours sur une collaboration autour des ressorts biographiques de nos orientations politiques. 

Le projet Droite-Gauche, conçu comme un projet à la fois de recherche et de création, et partiellement financé par des programmes intitulés "arts et sciences", a été et continue d’être nourri et activé par des "artistes" (chorégraphie, théâtre, son, vidéo, dessin) et des "chercheurs" (philosophie, sociologie, histoire). Si ces dénominations nous informent sur les outils dont chacun s’équipe pour aborder le travail, elles escamotent d’autres traits qui comptent tout autant (les lieux où nous avons grandi ; dans quelles situations nous en sommes déjà venu aux mains ; si nous préférons les ciels glacés, les vents chauds ou la moiteur qui enveloppe les corps ; etc.) Les questions mises au travail dans Droite-Gauche étaient formulées de la manière suivante : comment se forgent et varient nos ethos politiques ? Ou bien : comment se forge notre positionnement au sein de rapports de pouvoir ? Ou bien : comment se forgent nos conceptions de ce qui est "réel", "possible", "souhaitable" ?

Une étape de travail, publique, engageant les chercheurs à présenter leurs travaux depuis la scène du théâtre, a constitué une première incarnation de ce projet (Théâtre de la Cité, Marseille, février 2017, Festival Parallèle). Le projet sous sa forme de "spectacle vivant" (Théâtre de la Joliette, Marseille, février 2018, Festival Parallèle) a notamment consisté à opérer des transferts, des redistributions, entre énoncés "scientifiques", hérités du travail des chercheurs, et énoncés "sensibles", élaborés par l’ensemble des personnes impliquées dans le projet, chercheurs compris. Aujourd’hui nous travaillons à une publication commune, comme une troisième manifestation possible de cette collaboration et avec pour intentions d’une part de clarifier les enjeux auxquels répondent ces projets transversaux et d’autre part de construire les conditions de réception d’un projet comme Droite-Gauche, pour lequel la rencontre entre les sciences sociales et la création artistique ne vise ni une cosmétisation de la recherche scientifique ni une fonctionnalité de l’art.

Pour le séminaire, nous (Marjorie Glas, "sociologue", Sandra Iché, "danseuse", et Candice Raymond, "historienne") reviendrons sur les motivations qui ont présidé, pour chacune, à notre implication dans le projet, sur la fécondité de cette fréquentation "art et sciences" pour nos pratiques respectives, ainsi que sur les éventuelles gênes ou résistances éprouvées (en vrac, réflexivité méthodologique sur nos "ordres de discours", sur nos outils de transmission…) Nous tenterons notamment de dégager précisément quelques termes/thèmes qui sont au coeur du travail et dont le sens et les usages étant différents d’une discipline à l’autre se trouvent reconfigurés par notre cohabitation : sources, imaginaires, énonciations.

Norbert Corsino, chorégraphe et chercheur, Scène 44, n + n Corsino, Marseille : Machinations.

Les domaines ouverts par les arts numériques génèrent des topologies transportables coextensives dans lesquelles la danse peut surgir et s’écrire. Ils libèrent de l’espace à l’imaginaire. Ces outils neufs, les danseurs, les artistes, peuvent et doivent s’en emparer, les technologies en constant devenir et donc toujours inachevées continuent avec d’autres appareillages les techniques du corps, touchant là une caractéristique de la danse de n’avoir ni début ni fin : il n’y a pas de premier geste, ni a fortiori de dernier. Toutes les techniques développées dans les mondes virtuels, demandent que le corps soit étiqueté sur les déplacements dans l’espace, par ses systèmes de repérages perceptifs et représentatifs. Machine vient de ruse, stratagème, machination.

Recherche, arts et pratiques numériques #18

23/05/2018, 10h-13h, IMéRA, Marseille.

"Cartographie entre crises et mouvements"

Thomas Cantens, anthropologue, douanier, Organisation mondiale des douanes, Bruxelles : Crises violentes, crises de lisibilité : frontières fragiles en chiffres et en cartes.

A partir d’une série de terrains dans des zones frontalières fragiles en Afrique, la communication proposera une analyse critique du cadre conceptuel et pratique des politiques de sécurité en frontière et proposera un autre cadre analytique fondé sur une représentation de l’espace et de la circulation de la richesse qui tient compte des pratiques des groupes armés. Dans ce cadre, la communication montrera l’usage crucial de la cartographie et de la statistique à la condition d’une pensée sans l’Etat.

Françoise Bahoken, géographe et cartographe, Université Paris-Est / AME-SPLOTT / IFSTTAR : Le point, la ligne et la flèche. Cartographier " l'implantation spatiale " de mouvements. 

La projection de figurés sur un fond de carte, pour cartographier un mouvement, revêt des significations différentes qui, si elles dépendent de considérations éminemment graphiques, résultent avant tout du cadre théorique dans lequel elles s’inscrivent ; ce dernier caractérisant la manière dont l’espace (géographique, social, cognitif, etc.) des échanges est appréhendé.

Dans le contexte de l’analyse géographique, l’objectif de représenter le franchissement de limites de zones territoriales (de frontières nationales, par exemple) se voit en effet confronté à différents paramètres : l’échelle d’observation, les positions des lieux, a fortiori l’interprétation de leur espacement (éloignement, voisinage) ; l’implantation spatiale de ces lieux mis en interaction, formant le fond de carte. La représentation est également sensible, d’une part, à la manifestation d’éventuels effets-frontières bien connus (discontinuités, barrières, etc.) ; d’autre part, à un paradoxe lié à la possibilité d’un décalage entre l’information disponible, sa représentation cartographique, sa perception par un observateur statique et la demande sociale d’information visuelle sur le phénomène représenté. Ainsi, au-delà des aspects purement thématiques (flux commerciaux, flux démographiques, flux financiers), graphiques ou technologiques (support papier, numérique, interactif), à l’heure du "Tous Cartographes !", c’est par le recours aux fondements théoriques de la notion de mouvement que nous proposons d’explorer les modalités de sa cartographie. L’introduction d’une distance cartographique permet en effet de résoudre ce paradoxe, tout en étendant les possibilités classiques de filtrage des flux, en mobilisant l’espace.

Recherche, arts et pratiques numériques #19

14/11/2018, 10h-13h, IMéRA, Marseille.

"Du documentaire artistique aux écritures ludiques et interactives."

Lors de cette rencontre, les intervenants reviendront sur les expérimentations art-sciences qui ont été menées dans le cadre des trois workshops organisés lors du second Forum du GIS Moyen-Orient Mondes Musulmans à Aix-en-Provence du 28 au 31 septembre 2018.

François Lejault, vidéaste et professeur à l’Ecole supérieure d’art d’Aix-en-Provence : Regarder ailleurs, écouter loin, création vidéo. 

Le fait divers est un grand déclencheur d’imaginaire. Il dessine souvent un détail frappant d’une société, de son évolution, de ses difficultés, de ses travers. Du ridicule au tragique, de l’absurde au fantastique, la palette est généreuse et foisonnante. Mais comment ces récits de morceaux de vies se transforment de l’oralité ou du compte rendu journalistique à la forme filmique? Comment le passage d’un médium à l’autre va-t-il amplifier, détourner, décadrer ces histoires du quotidien? C’est ce déplacement entre le récit factuel et sa mise en image et sons auquel se sont confrontés les participants du workshop Regarder ailleurs, écouter loin, création vidéo. A partir des récits colportés par chacun d’entre eux, ils ont élaboré sept petites formes filmiques courtes et bricolées dans une urgence créative et avec un souci de précision dans les choix esthétiques. Ils ont exploré avec gourmandise tous les possibles offerts par le numérique en revendiquant le mélange et l’hybridation entre les registres et les techniques.

Douglas Edric Stanley, artiste numérique et professeur à l’ESA Aix-en-Provence et Leslie Astier, artiste : Écritures ludiques interactives.

A l’occasion du workshop Écritures ludiques et interactives, 5 étudiants en arts et 5 chercheurs se sont réunis en binômes afin de faire émerger ensemble des narrations communes à la rencontre des territoires de recherche de chacun. Durant trois jours les équipes se sont familiarisées avec des techniques de prototypage rapide de jeux (papier, vidéo, narration interactive) accompagnées par des outils ludico-méthodologiques expérimentaux développés au coeur de l’atelier Jeux de l’ESAAix. Poursuivant le travail de collaboration formulé autour du projet A Crossing Industry, les étudiants et les chercheurs ont inventé ensemble des nouvelles formes hybrides entre recherche scientifique et création.

Pascal Cesaro, Maître de conférences en études cinématographiques et audiovisuelles, chercheur au Laboratoire PRISM (Aix-Marseille Université/CNRS) : Écritures documentaires: recherche et création. 

Après avoir observé et tenté de saisir les expérimentations qui ont été mises en oeuvre entre chercheurs et étudiants en art au cours des ateliers 1 et 2, les étudiants du Master 2 Écritures Documentaires: recherche et création, dirigé par Pascal Cesaro, ont élaboré de courtes formes documentaires filmiques. L’enjeu était moins de documenter de manière exhaustive les expérimentations qui ont été réalisées au cours de ces trois jours que de mettre l’accent, à travers cette forme spécifique d’écriture, sur l’intensité des déplacements qu’a constitué pour les chercheurs et les artistes l’engagement dans ces expérimentations, au croisement de la recherche et de la création.

Recherche, arts et pratiques numériques #20

12/12/2018, 10h-13h, IMéRA, Marseille.

"Drone-Art"

Gaëtan Bailly, photographe-vidéaste indépendant, Jeanne Drouet, anthropologue, Centre Max Weber (UMR 5283), Adelin Schweitzer, artiste (performances immersives, expérimentations audiovisuelles et nouvelles technologies), Marie-Thérèse Têtu, socio-anthropologue, Centre Max Weber (UMR 5283), Pina Wood, artiste (performeuse, dramaturge et interprète).

Enquêter avec Jules. Retours sur l’expérience des dronards à Villeurbanne.

Les Dronards est un collectif d’artistes pluridisciplinaire fondé en 2014. Il est rejoint par deux socio-anthropologues lorsqu’il "atterrit" à Villeurbanne, en juillet 2017. L’épisode villeurbannais s’articule autour de la dérive urbaine de Jules, un rover (engin roulant télécommandé) équipé d’une caméra légère, dans deux quartiers de la ville, Grand Clément et Bel-Air-Les-Brosses.

Le matériau produit durant l’été 2017, soit de courtes pastilles vidéos retraçant les pérégrinations de Jules et ses acolytes, jour après jour, nous servira de base ou tremplin pour dégager les multiples enjeux du projet. Chaque intervenant, artiste ou chercheur, ouvrira un ou deux axes de réflexion qui lui semble prépondérant sur la base d’un extrait projeté. Où il sera question des modalités spécifiques de l’enquête, des modes de rencontre et d’interaction, de différents "points de vue filmiques", de l’interaction homme-machine, etc. Ce retour d’expérience s’ouvrira sur un échange autour et en présence de Jules.

Recherche, arts et pratiques numériques #21

16/01/2019, 10h-13h, IMéRA, Marseille.

"Représenter l'exil en Méditerranée aujourd'hui."

Elsa Gomis, School of Art, Media and American Studies, University of Anglia, Norfolk : Retours à mi-parcours sur un doctorat par la pratique.

L’intervention se déroulera en trois temps. Elle débutera par une introduction permettant de situer les ambitions du travail doctoral en cours au plan théorique. Un flm d’une durée 1h15 environ, Te People Behind Te Scenes (Ceux qui sont en coulisses) faisant partie du volet pratique de la recherche sera ensuite projeté. Il sera suivi de la présentation de quelques images permettant de situer le contexte esthétique, le déroulé du tournage et l’apport du flm au regard du plan critique initialement exposé. L’intervention s’achèvera par un échange d’une demi-heure environ avec l’assistance.

Recherche, arts et pratiques numériques #22

06/02/2019, 10h-13h, IMéRA, Marseille.

"Frontières fragiles, économie et géodata"

Thomas Cantens, anthropologue, douanier, Unité de recherche de l’Organisation mondiale des douanes, Ecole d’économie de l’Université d’Auvergne.

La communication présentera les derniers travaux entrepris sur les frontières fragiles et les questions conceptuelles et pratiques qu’ils soulèvent, à partir de 16 terrains menés entre 2016 et 2018 sur les frontières africaines où opèrent des groupes armés. La communication discutera des stratégies des groupes armés par rapport à l’économie de la frontière, de la compétition fiscale qu’ils s’y livrent avec les appareils d’Etat pour la gouverner et proposera une lecture critique des solutions apportées par les états et de leurs biais calculatoires. Enfin, la communication proposera des pistes de réflexion et présentera des solutions envisagées qui modifient la représentation de la zone frontière et de son économie pour mieux en appréhender la complexité. La présentation de ces solutions technologiques sera l’opportunité d’une discussion sur leur portée épistémologique et politique des outils numériques mobilisés dans le cadre de nos recherches.

Recherche, arts et pratiques numériques #23

22/03/2019, 10h-13h, IMéRA, Marseille.

"Enjeux esthétiques de l’investigation."

Bureau d’études, représenté par Léonore Bonaccini et Xavier Fourt : Aliens in Green.

Bureau d’études propose un travail de recherche, de collecte et de mise en forme des structures invisibles de la société mondiale. Ce collectif d’artiste créent des cartes, quelques fois à l’échelle d‘un mur entier. Ce sont des représentations graphiques des différents systèmes de pouvoirs, politique, économique, ou médiatique qui combinent la richesse documentaire à la recherche esthétique pour tenter de rendre visibles "les paysages cachés" de notre société, comme les structures étatiques, financières, ou administratives.

Cette présentation se concentrera sur les investigations qui ont été réalisées dans le cadre du collectif Aliens in green co-créé avec Ewen Chardronnet et Spela Petric, ainsi qu’avec différents collaborateurs/collaboratrices occasionnel(les). Le travail du collectif tourne autour de la question des perturbateurs endocriniens et l’une de ses formes finales est un théâtre-performance. Différentes formes et dispositifs ont été créés et expérimentés dans ce contexte. Ils présenteront à la fois le contexte d’émergence du travail, ainsi que différents travaux que nous avons réalisés dans ce contexte, et notamment les versions d’un jeu ainsi que des cartographies et autres dispositifs d’information, tournant autour de la question des perturbateurs endocriniens.

Hendrik Sturm, artiste marcheur, neurobiologie, Ecole des Beaux-Arts de Toulon.

Xénophores, les "porteurs d’étrangers" : récit d’une promenade sur le Mont-Royal.

La rencontre avec les Xénophores dans la vitrine du musée Redpath à Montréal a été le point de départ d’une promenade-enquête sur un parcours de 3 kilomètres sur la pente du Mont-Royal en mai 2017. Il s’est avéré que cet escargot marin est aussi une métaphore de ma démarche de promeneur-enquêteur en tant que collect(ionn)eur d’histoires sur le chemin."

Recherche, arts et pratiques numériques #24

17/04/2019, 10h-13h, IMéRA, Marseille.

"Du film à la performance, de la performance au film"

Baptiste Buob, anthropologue (LESC-CNRS), Jérémy Demesmaeker, chorégraphe, Cie Dodescaden : "Les maîtres fous". Du film à la performance, de la performance au film.

Par le projet Performance in abstentia, nous souhaitons concevoir un automate informatique afin de produire des montages en temps-réel à partir d’un corpus audiovisuel composé d’un ensemble de plans-séquences filmés tout au long de l’élaboration de la performance chorégraphique "Les Maîtres fous". Cet automate sera au cœur d’une installation multi-écran projetant en continu des montages successifs, uniques. S’inscrivant dans les réflexions concernant la qualité performative des archives, l’objectif général est d’expérimenter une façon de "réanimer" des films en les dotant d’une vitalité par laquelle le public pourra s’immerger dans une performance in abstentia. Durant la phase de développement, il s’agira de créer cet automate, notamment en établissant un script narratif, en spécifiant les ontologies au centre du modèle de données ainsi que le jeu des combinatoires qui contraindront l’automate.

Recherche, arts et pratiques numériques #25

15/05/2019, 10h-13h, IMéRA, Marseille.

"L'esthétique du mur"

Elisa Ganivet, docteure en philosophie, historienne de l’art et manager culturel : Plein feu sur l’esthétique du mur.

Elisa Ganivet proposera une mise en lumière historique de l’esthétique du mur-frontière. L’aller et retour constant de ces deux concepts, pourtant initialement bien définis, pose en effet un problème majeur contemporain a priori lié à une mauvaise gestion de la mondialisation. Comment les artistes se jouent-ils de ce dispositif biopolitique immobile, comment s’approprient-ils ce phénomène géopolitique tangible ? Dans quelles mesures leurs réponses expriment-elles une dénonciation et un éveil sur l’état du monde ?

Nicolas Mémain, urbaniste, artiste marcheur, cartographe, enseignant à l'ESSAix : Contempler la perte des savoirs faire la ville.

L'effondrement des immeubles de la rue d’Aubagne à Marseille a déclenché, à l’automne dernier, une énorme émotion collective ainsi qu’une crise historique pour la ville et sa gestion, une enquête est d’ailleurs ouverte et en cours. L'ampleur de la mobilisation citoyenne a sans doute été préparée par la montée en intensité de l'opposition au chantier de la Place Jean Jaurès, à 200 mètres de là. Des murs qui abritent tombent quand des murs qui séparent s’élèvent. Nicolas Mémain proposera de faire le simple récit de deux saisons en enfer. Cette séance aura lieu dans le cadre du Festival Jeu de l'Oie. Les sciences de la société et des arts dans la cité. Retrouver toutes les séances du séminaire sur le site de l'antiAtlas des frontières.